Dublin Core
Titre
Alternative Title
Sujet
Description
Encore une fois tout semblait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles comme disait le grand Voltaire que peuchère je n’ai jamais lu son oeuvre.
Peut-être un jour quand je serai retraitée, c’est ce qu’ils disent tous : le jour où...
Quelqu’un frappe à la porte, Maître Bardot :
- Bonjour Jeanne. René n’avait pas de famille et comme vous êtes l’héritière de son bien tout le monde pense que c’est à vous de prendre en charge l’enterrement. Je sais que ce n’est pas simple : il était catholique et cette religion n’aime pas trop les suicidés !
- Je ne pense pas que René était tellement religieux! Je vais aller voir le curé de la paroisse. Il y a certainement dans la tombe de sa femme Rosette une place pour lui.
- Et non ! C’est à la mairie que vous devez aller.
- Je ferai tout ce qu’il faut pour qu’il ait un bon voyage de l’autre côté. Nous n’irons pas au funérarium comme pour l’Oncle Vincent. Et le verre de l’amitié se fera dans son jardin.
- Votre jardin maintenant !
- Par pour longtemps vous pouvez me croire !
- À bientôt Jeanne !
Je n’ai qu’une envie : aller au lit et me réveiller après l’enterrement ! Sûr que je n’ai pas pu le faire pour moi mais je vais le faire pour vous ! Et maintenant que tout est fini comme dans la chanson je peux vous l’assurer : tout s’est bien passé et René et sa femme « requiescant in pace » dans le cimetière communal.
Aujourd’hui c’est samedi et Mathilde arrive lundi 24 Juin à Fréjorgues. Pour le moment elle restera avec moi à la maison jusqu’à l’accouchement. Je n’ai rien dit à personne dans le village. Ce sera la surprise pour tout le monde, surtout le ventre. Heureusement que son homme n’est pas venu avec elle. Mais un jour il faudra bien et alors ce sera le scandale au village.
Bon et demain comment allons-nous nous retrouver ? Pour moi la rancune s’il y en a eu n’existe plus. Tant de choses ont changé dans ma vie depuis le mois d’octobre ! Peut-être que je suis une autre femme : plus jeune ou peut-être plus vieille...
Ce matin je suis allée à Béziers et j’ai acheté des rideaux pour la chambre de Mathilde : avec des fleurs jaunes et rouges et des oiseaux verts et bleus, le printemps et l’été sont entrés ensembles plein de joie dans la maison pour la Saint Jean ! Avec la machine ça a été vite fait : Hôtel 4 étoiles ! Et maintenant j’essaie de me souvenir ce qu'elle aimait le plus manger : la friture de poissons à la catalane, les côtelettes d’agneau, les haricots, la salade verte, le fromage de chèvre... Ça suffit pour commencer : il y aura tout dans le frigo. Cuire sera vite fait.
Maintenant c’est dimanche. Angèle la voisine amoureuse de René est venue me voir pour s’excuser de ce qu’elle m’avait dit.
- Ô Madame Jeanne je sais bien que vous ne l’avez pas tué et de toutes façons je me souviens de ce qu’il vous a fait dans votre jeunesse quand il a fait un enfant à la Rosette. C’est de sa faute si vous êtes restée vieille fille ! Mais vous comprenez maintenant qu’il n’est plus là je suis toute seule ! Ça me fait pleurer. Je lui ai apporté son dîner tous les jours depuis la mort de Rosette. Chaque fois je lui demandais ce qui lui plairait. Je connais les hommes, je suis restée quarante ans avec mon Edmond. Évidemment vous ne pouvez pas savoir parce que vous avez été seule toute votre vie. Ce n’est pas simple pour un homme d’être veuf et c’est pour ça que les femmes vivent plus longtemps que les hommes. Maintenant ma vie est une friche : plus de René pour discuter du village et des gens !
Je l’ai prise dans mes bras cette petite femme bravette avec son chignon cendré et je l’ai embrassée.
- Vous pouvez venir me voir quand vous voulez, ça me fera plaisir Angèle !
- Eh bé vous êtes bien brave ! Je n’aurais jamais cru qu’un jour ce serait possible de discuter avec vous comme avec une amie ! Je n’oublierai pas de venir Jeanne, avec plaisir !
Demain je dois être à dix heures du matin à Fréjorgues. Le bonheur s’infiltre partout dans mes veines. L’histoire recommence au début : demain nous serons toutes les deux sur la terrasse comme l’année dernière à la même date. Le retour de l’enfant prodigue !
Au lit Madame que demain tout va changer !
Maintenant je suis assise devant la sortie « arrivée » de l’aéroport. Évidemment comme tous ceux qui vivent à la campagne, les paysans, je suis arrivée une heure avant l’heure. Il faut bouger un peu Jeanne, aller boire un café et lire un journal.
Ça me plaît de regarder les voyageurs qui s’en vont on ne sait pas où, peut-être de l’autre côté de la terre. J’ai commencé à lire un article sur les vignes du Languedoc et ils disent que le vin est de mieux en mieux et qu’il y a beaucoup d’américains qui achètent des vignobles dans le pays.
- Jeanne ! Je suis là ! Viens m’aider, les valises sont lourdes !
- Mathilde ! Ma fille ! Si jolie !
Je la prends dans mes bras mais avec le ventre c’est pas simple. Nous nous embrassons sans arrêt tout en criant comme deux enfants :
- Est-ce que je peux t’appeler « maman » ?
- Pourquoi pas ? Ça me ferait plus tôt plaisir à mon âge ! Oh ! Tu as changé la couleur de tes cheveux et tu n’as pas grossi. Sans le ventre tu dois être maigre !
- Et tu as changé de look aussi : tu es plus comme une dame de la ville. Plus de cheveux gris, des jeans de jeune fille, une chemise pleine de couleurs. Mais je t’ai reconnue Madame Jeanne !
- Et moi aussi Mademoiselle Mathilde ! Tu es toujours belle ! Rentrons à la maison !
Nous sommes dans la voiture. Mathilde est tellement heureuse de voir le paysage. Ça a été la même chose pour moi quand je suis revenue il y a deux semaines. Tout semble petit ici mais avec un grand choix de couleurs et on peut voir la campagne et surtout les vignes de chaque côté de la route. Dans l’autre pays il n’y a que des autoroutes avec des arbres gigantesques et gris de chaque côté qui cachent le paysage. Mathilde est heureuse des couleurs de sa chambre et elle n’arrête pas de dire : cool ! so cool !
J’ai préparé le dîner sur la terrasse : la friture de poissons avec l’aïoli. Quand Mathilde revient elle s’est changée : une chemise longue, légère et claire que je n’avais jamais vue.
- Où as-tu trouvé cette robe ?
- C’est Fred qui me l’a achetée quand il est allé voir sa mère pour Noël à Montego Bay.
- C’est où ?
- Une ville de son pays la Jamaïque.
- Tu as une photo de Fred ?
- Non. Mais je pense que je ne veux plus le voir. À chacun sa route !
- Je croyais que c’était le père de ton enfant ?
- L’un n’empêche pas l’autre ! Mais si je suis revenue ici c’est que l’histoire était finie ! Cette vie ne me plaisait plus. Sûr que c’est un bel homme, intelligent et tout et tout. Mais le monde de la musique quand on n’est pas musicien ce n’est pas pour moi. Dans la vie je ne veux pas être derrière et je veux décider quel chemin suivre.
- Et ton enfant n’aura pas de père !
- Il aura la couleur de sa peau et quand il sera grand s’il veut il pourra aller rendre visite à son père à New York ou à Montego Bay. Et peut-être que je trouverai un autre père pour lui, qui sait ? Et Rémy ?
- Il sera ici la semaine prochaine. Il est retraité et si tout se passe bien nous allons vivre ensemble ici et ailleurs...
- Est-ce que j’aurais la chance de rester ici quand vous serez ailleurs ?
- Pour le moment c’est la fête de la Saint Jean et une fête que je n’ai jamais vue : le Total Festum. Tu vas aller te reposer et on ira danser.
Un còp de mai tot semblava d’anar pel melhor dins lo melhor dels monds possibles coma disiá lo grand Voltaire que pecaire ai pas jamai legit son òbra.
Benlèu un jorn quand serai retirada : es çò que dison totes: lo jorn ont…
Qualqu'un tòca a la pòrta, Mèstre Bardot :
- Bonjorn Joana. Lo Renat aviá ges de familha e coma es vos l’eretièra de son ben tot lo mond pensa qu’es a vos de prendre en carga l’entèrrament. Sabi qu’es pas simple : èra catolic e aquela religion aima pas tròp los suicidats !
- Pensi pas que lo Renat èra tant religiós qu’aquò ! M’en vau anar veire lo curat de la parròquia. I a segurament dins la tomba de sa femna la Rosetta una plaça per el.
- E non ! es a la comuna que devètz anar e puèi veire la familha de Roseta.
- Farai tot çò que cal per qu’aja un bon viatge de l’autre costat. Anarem pas al funerarium coma per l’Oncle Vincent. E lo gòt de l’amistat se farà dins son jardin.
- Vòstre jardin ara !
- Pas per longtemps podètz me creire !
Ai pas qu’una enveja : anar al lièch e me desrevelhar aprèp l’entèrrament ! Segur qu’ai pas poscut o faire per ieu mas o vau faire per vos. E ara que tot es acabat coma dins la cançon o pòdi afortir : tot s’es plan passat e lo Renat e sa femna « resquiescant en pace » dins lo cementèri comunal.
Uèi sèm lo dissabte e la Matilda arriba lo diluns 24 de Junh a Frejòrgues. Per lo moment demorarà ambe ieu a l'ostal fins a la jacina. Ai pas res dich a degun dins lo vilatge. Serà la suspresa per tot lo mond, subretot lo ventre. Urosament que son òme es pas vengut amb ela. Mas un jorn caldrà ben e alara serà l’escandal dins lo vilatge.
Bon e deman cossí anam nos tornar trobar ? Per ieu la rancura se n’i a aguda existís pas pus. Tant de causas an cambiadas dins ma vida dempuèi lo mes d’octòbre. Benlèu que siái una autra femna : mai jove o benlèu mai vièlha...
Siái anada a Besièrs aqueste matin e ai crompat de ridèus per la cambra de Matilda : amb de flors jaunas e rojas e d’aucèls verds e blaus, la prima e l’estiu son dintrats ensem plen de jòia dins l’ostal per la San Joan ! Amb la machina es estat lèu fach : ostalariá 4 estelas ! E ara ensage de me sovenir çò que li agradava mai per manjar : la parelhada de peis a la catalana, las costèlas d’anhèl, los faviòls, l'ensalada verda, lo fromatge de cabra... N’i a pron per començar : i aura tot aquò dins lo frigò. Còire serà lèu fach.
Ara sèm dimenge, Angèla la vesina amorosa del Renat es venguda me veire per se desencusar de çò que m’aviá dich.
- O Madama Joana sabi ben que l'avètz pas tuat e de tot biais me soveni de çò que vos a fach dins vòstra joinessa quand a fach un enfant a la Rosetta. Es de sa fauta se siatz demorada tanturla ! Mas comprenètz ara qu’es pas pus aicí siái tota sola ! Aquò me fa plorar. Li ai portat lo dinnar cada jorn dempuèi la mòrt de la Roseta. Cada còp li demandava çò que li agradariá. Ieu coneissi los òmes, sieu demorada quaranta ans ambe mon Edmond. Evidentament o podetz pas saupre per de qu'avètz estada soleta tota vòstra vida. Es pas simple per un òme d'èstre veuse e es per aquò que las femnas vivon mai longtemps que los òmes. Ara ma vida es un ermàs : pas pus de Renat per discutir del vilatge e de las gens !
L’ai presa dins mos braces aquela pichòta femnòta braveta amb son coconhon cendrat e l’ai potonejada.
- Podètz me venir veire quand volètz me farà plaser Angèla !
- E bè sai que ! sètz plan brava ! Auriái pas jamai cregut qu’un jorn seriá possible de charrar ambe vos coma amb una amiga ! Doblidarai pas de venir Joana, ambe plaser !
Deman devi èstre a 10 oras del matin a Frejòrgues. Lo bonur dintra d’en pertot dins mas venas. L’istòria recomença tre la debuta : deman serem totas doas sus la terrassa coma l’an passat a la meteissa data. Lo retorn de l’enfant prodiga. Au lièch madama que deman tot va cambiar !
Ara siái assetada davant la sortida « Arrivée » de l’aeropòrt. Evidentament coma totes los que vivon dins la campanha, los païsans, siái arribada una ’ora avant l’ora. Cal bolegar un pauc Joana, anar beure un cafè e legir un jornal. M’agrada de gaitar los viatjaires que s’en van òm sap pas ont, benlèu de l’autre costat del mond. Ai començat de legir un article sus las vinhas en Lengadòc e dison que lo vin es de mai en mai bon e que i a fòrça americans que crompan de vinhals dins lo pais.
- Joana ! siái aquí ! Vèni m’ajudar que los bagatges son pesucs !
- Matilda ! Ma filha ! Tant polida !
La preni dins mos braces mas amb lo ventre es pas simple. Nos potonejam sens relambi tot en cridant coma dos enfants.
- Es que te pòdi sonar « maman » !
- Perqué pas, me fariá pus lèu plaser a mon atge. Oh ! as cambiat ta color de pels e as pas engraissat. Sens lo ventre deves èstre magreta !
- E tu as cambiat de look tanben : siás mai coma una dama de la vila. Pus ges de pels grises, de jeans de joina filha, una camisa plena de colors. Mas t’ai reconeguda madama Joana !
- E ieu tanben Madomaisèla Matilda ! Siás totjorn bèla !
Dintram a l’ostal !
Sèm dins la veitura. Matilda es tan urosa de veire lo païsatge. Es estat la meteissa causa per ieu quand tornèri fa doas setmanas. Tot sembla pichòt aquí mas amb una granda causida de colors e òm pòt veire la campanha e subretot las vinhas de cada costat de la rota. Dins l’autre pais i pas que de d'autostradas amb d’arbres gigantàs e grisàs de cada costat qu’amagan lo païsatge.
Matilda es urosa de las colors de sa cambra e arrèsta pas de dire : cool ! so cool ! Ai preparat lo sopar sus la terrassa : la parelhada de peis ambe l’aiòli.
Quand Matilda torna s’es cambiada : una camisa longa, leugièra e clara qu’aviái pas jamai vista.
- Ont as trapada aquela rauba ?
- Es Fred que me l’a crompada quand es anat visitar sa maire per nadal a Montego Bay.
- Ont es aquò ?
- Una ciutat de son pais la Jamaica.
- As una fòto de Fred ?
- Non. Mas pensi que lo vòle pas pus veire. A cadun sa tòca !
- Cresiái qu’èra lo paire de ton enfant.
- L’un empacha pas l’autre! Mas se siái tornada aicí es que l’istòria èra acabada. Aquela vida m’agradava pas. Segur qu’es un bèl òme, intelligent e tot e tot. Mas lo monde de la musica quand òm es pas musicaire es pas per ieu. Dins la vida vòli pas èstre darrièr e vòli decidir quin camin seguir.
- E ton enfant aura ges de paire !
- Aurà la color de sa pèl e quand serà grandet se vòl serà possible per el de visitar son paire a New York o a Montego Bay. E benlèu que traparai un autre paire per el, qual sap ?
E Rémy?
- Serà aicí la setmana que ven. Es retirat e se tot se passa plan anam viure ensems, aicí, ailà !
- Es qu’aurai l’escasença de demorar aicí quand seretz ailà ?
- Per lo moment es la Fèsta de la San Joan e una Fèsta qu’ai pas jamai vista: lo Total Festum. Vas anar te pausar e anirem dançar
Abstract
Créateur
Éditeur
Date
Date Issued
Droits
License
Sous licence creative commons :
http://creativecommons.fr/licences/
Attribution : CIRDÒC-Mediatèca Occitana
Pas d’utilisation commerciale